samedi, 25 janvier 2014

La nuit attendra…

Il est des vies qui vous laissent pantois, des destins, qui mêmes provoqués, sont étonnants d’apparentes simplicités et où, quoi qu’il en soit, la chance à une part importante pour ceux qui ont su la saisir.

Jacques Chancel est de ceux-là.

Pour moi, souvenir d’enfance oblige, c’était surtout une voix grave et douce, sortie du poste à une époque où la radio était maîtresse à la maison. « Radioscopie» a bercé certaines de mes fins de journée quand je traînais dans les pattes de ma mère.

Plus tard, alors que la télévision faisait des apparitions sporadiques chez nous au fil des pannes et des récupérations divers et varié (on a même eu deux postes : un pour le son et l’autre pour l’image !), nous avions quelques soirs l’autorisation de regarder le grand échiquier.

C’est sa jeunesse indochinoise qu’il nous raconte dans « La nuit attendra».  

Adolescent, il rêve d’aventure, de s’échapper de ce monde où il a l’impression que ceux de son âge ne pensent qu’à s’amuser et surtout de ne rien faire qui pourrais les fatiguer. Lui le boulimique de travail et d’action ne songe plus qu’à quitter ses Pyrénées.

Il se vieillit pour faire l’école de transmission et être envoyé, au grand dam de ses parents, en Indochine pour faire son service militaire.

Sur le bateau, le voyage dure alors un mois, il se fera remarquer en montant un orchestre de Jazz, ainsi qu’une troupe affiliée aux théâtres des armées. Pour passer le temps, il discute aussi beaucoup littérature avec quelques gradés.

À peine a-t-il posé le pied à Saigon, qu’il est pris en charge par un étrange Ange Gardien que l’on a sollicité pour veiller sur le petit Jacques, protection qui sans l’empêcher de vivre sa vie lui sera bien utile notamment en lui permettant de rencontrer les gens qui comptent là-bas.

Très vite repérée pour ses capacités d’animation et ces connaissances musicales, tout en étant militaire, la mission locale de radio France lui propose de créer une émission pour les soldats au front ; le principe, ces derniers lui demandent une chanson avec un message pour une ou un ami, parent…

Devant le rapide succès, et toujours désireux d’aventure il organisera des numéros spéciaux sur le terrain, au plus près des combats. De fil en aiguille il deviendra également correspondant de guerre, puis à la fin de son service reporter incontournable pour tous les journalistes arrivant sur place. Il sera même censuré quand il dénoncera bien avant le drame que l’on connaît, la folie des généraux français qui s’apprêtent à envoyer par millier des jeunes au casse-pipe dans la cuvette de Diên Biên Phu…

Il prendra beaucoup de risque, un jour sa Jeep saute sur une mine. Seul rescapé, il restera presque un an aveugle…

Il s’amusera aussi beaucoup en organisant une tournée asiatique pour Joséphine Baker ou un défilé de mode au milieu des éléphants.

La galerie de personnages rencontrés, des plus sympathiques au plus troubles est juste étonnante.

À 20 ans, à la fin de la guerre, il aura vu bien plus que la plupart des gamins de son âge, l’amour et la mort, la joie et la tristesse, l’existence facile et l’autre, l’insupportable…

Ce livre, passionnant, est une belle leçon de vie.

Bien écrit, palpitant, on a plus envie de le lâcher, on dirait un roman, sauf que tout cela est vrai…

rêve de plage...

C’est beau, non ?

pho1400024.jpg