mardi, 24 mai 2016

L'habit ne fait pas la nonne...

C’est une de ces réunions placées sous les ors de la république où il fait bon, à tout courtisan qui se respecte, de se montrer.

 

Tout le gratin est présent, pensez donc la ministre est là accompagné de ses sous-ministres et même de celui qui tient les cordons de la bourse ; et justement, il va être question de distribuer un peu du contenu de cette bourse.

Quelques journaleux aussi, deux ou trois photographes pour l’image et bien sûr les télés d’info.

Autour de cela grouilles toutes sortent de gens d’importances, ou du moins qui sont persuadés d’en être puisqu’ils sont là et dont la principale raison de leurs présences semble plus êtres le buffet ultime (ils vont être déçu) et éventuellement l’occasion de glisser un mot ou deux à quelques plus primordiaux qu’eux.

Si cet aréopage est réuni, c’est pour juger de la qualité de projet présenté par les finalistes d’un concours national espérant bien décrocher la subvention sonnante et trébuchante histoire de concrétiser leur grande idée.

Les candidats sont installés juste devant moi, la plupart sur leur trente-et-un, sauf les trois là-bas un peu baba cool sur les bords. Les deux d’à côté ont plutôt le style HEC aux dents acérées qui veulent gagner, mais les quatre jeunes, cheveux longs faussement naturels genre promo science Po 2012 risques de leur donner du fil à retordre !

 

Et puis il y a les deux dames blondes, la trentaine, style bourgeoises versaillaises, tailleurs stricts comme la chevelure ; en d’autres temps, force des préjugés, je les aurais bien imaginés dans une manif pour tous, gueulant des slogans anti-homos ou psalmodiant quelques versets de la Bible.

On leur donnerait le Bon Dieu sans confession.

Le genre que l’on ne serait pas étonné de voir une photo du pape dans le portefeuille.

 

Elles sont les dernières à passer, présentation parfaite, bien bossées, elle connaissait leur sujet, mots bien choisis, ton neutre, un exposé de petites filles modèle.

 

L’épreuve finie, voila la plus châtain des deux qui revient vers ma régie devant laquelle elles ont posé leurs affaires. Me tournant le dos, elle se penche en avant, pour ranger quelques documents dans sa sacoche, dévoilant alors à mon regard un charmant tatouage. Un sympathique serpent dont la queue venant du ventre contourne la hanche pour laisser la tête plonger plein centre vers la fessière vallée.

Voilà une dame qui cache bien son jeu !

J’avoue que j’aurais bien aimé voir jusqu’où ce reptile allait se nicher ; mais vous le savez bien, j’ai une imagination débordante…

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Sur une idée de Kozlika ; Pour les autres bonheurs du jour, c’est là

Scène de la vie d'acteur...

Si j’adore le Denis Podalydès acteur, si j’ai bien aimé le Denis Podalydès romancier avec son « Fuir Pénélope », j’avoue être plus mitigé avec ses « Scènes de la vie d’acteur ».

Ce livre regroupe une série de chroniques qu’il a écrites, un peu comme un journal, réflexion sur ce qui fait le comédien, ce métier étrange, la célébrité, la préparation, la différence entre un tournage et une pièce de théâtre…

J’ai trouvé l’ensemble assez inégal, avec des récits passionnants comme la description de l’angoisse du trou noir quand il arrive. Ce mot, cette réplique, la phrase connue par cœur, jouée plus de 100 fois sur scène et qui soudainement s’envole de la mémoire de l’acteur qui en reste bouche bée. La suée qui coule, les mains qui deviennent moites, le palpitant qui s’affole, et le partenaire qui attend, veut aider ; le cerveau qui fouille au tréfonds de ses souvenirs, essaye de se raccrocher à un mot pour tenter de retrouver le droit chemin…

Et puis des pages que l’on a envie de tourner vite sans les finir, notamment quand il raconte ses répétitions en Russie, c’est long, trop long.

L’avantage de ces petits récits c’est que justement l’on peut sauter des passages…

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4° de couverture :

 

«Voici regroupées des chroniques écrites au fil du temps depuis maintenant une dizaine d’années. Si je les souhaite à peu près véritables, elles n’en sont pas moins romancées. L’anonymat n’est pas prétexte à me donner licence de tout dire. Peu importe qui parle et de qui je parle (les noms sont fictifs - à l’exception des morts -, les circonstances très souvent modifiées). J’ai toujours écrit ces textes dans le désir, non d’affirmer quoi que ce soit, mais de décrire, dépeindre, raconter une vie ordinaire de comédien ordinaire. Je ne donne aucune connotation péjorative à ce mot, que je ne prends pas dans le sens de terne, moyen, médiocre, mais dans celui de coutumier, régulier, normal. La banalité en question m’est précieuse. Un autre mot serait pour moi tentant, s’il n’était source de malentendu : le beau mot de classique. Plus exactement, sans porter le moindre jugement de valeur, sans jouer le désenchantement du comédien qui commence à en avoir beaucoup vu, je voudrais montrer l’ordinaire d’une vie que l’on a coutume de percevoir comme nécessairement et toujours extraordinaire. Et j’aimerais évidemment qu’on perçoive le caractère un peu, parfois, extra-ordinaire de cet ordinaire.»