Donc le premier livre des vacances a été avalé en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Soyons honnêtes, 70 pages ce n’est pas non plus la mer à boire…

Certes, certes, mais quand l’auteur en est Michel Serre, c’est plutôt intense comme lecture, passionnante !

Petite poucette

Le problème avec lui, c’est que bien souvent, à l’oral, il est d’une grande limpidité, que l’on croit être d’une intelligence suprême, tellement on le comprend bien ! Mais à l’écrit, je me rappelle du « Tiers instruit », honte à moi, que je n’ai jamais pu finir à force de relire plusieurs fois chaque paragraphe pour juste essayer de piger ce dont ceti de quoi ça cause ! Question d’habitude, diront certains…

Par chance, ce n’est pas le cas avec « Petite poucette », où il nous livre sa pensée philosophique sur la nouvelle génération qu’il considère comme une heureuse génération mutante, bien malgré nous, les anciens. « Petite poucette » en hommage à la dextérité des jeunes pour taper des SMS avec leurs pouces.

Michel Serre part du principe que nous sommes dans la troisième grande révolution sociétale de l’humanité, après le passage de l’oral à l’écrit, puis de l’écrit à l’imprimerie, voici l’ère des nouvelles technologies ; internet, l’informatique…

Et de fait, le cognitif mute, les apprentissages doivent s’adapter, les modes de réflexions sont différents, les connexions neuronales ne se font plus de la même façon, les besoins ne sont plus les mêmes. Un certain savoir, démocratie suprême, est à portée de tout le monde, d’un simple clic, là où avant il fallait faire partie d’une caste ayant fait de longues études…

Pour Michel Serre, c’est tout notre enseignement qui est à revoir…

La lecture de ce livre m’a remis à l’esprit une discussion avec un ami professeur qui me disait comment les logiques de pensée avaient changé chez les enfants, la perception du temps et de l’espace dans lesquels ils évoluent. Il prenait comme exemple, une carte routière. Avant pour aller d’un point A à un point B, il fallait d’abord commencer à se repérer, savoir où l’on était, après l’on devait trouver l’arrivé et faire son parcoure. Maintenant, peu importe le lieu où l’on est, seule la destination compte, le GPS s’occupe du reste.

Encore un exemple récent, la panne générale d’Orange. Finalement ce n’était qu’un incident mais qu’on expliqué la plupart des gens ? Qu’ils avaient raté des rendez-vous avec amis, professionnel ou autre parce qu’ils n’arrivaient pas à les joindre ! Aujourd’hui, l’on dit « on se voit demain, je te rappelle » et l’on se recontacte une heure avant pour savoir où l’on se retrouve. Il fut une époque où tout rendez-vous était planifié bien en amont, non pas que c’était mieux, mais juste qu’il n’y avait pas le choix.

Derniers exemples, en lisant ce livre, comme bien souvent avec Michel Serre, j’ai eu le plaisir de buter sur des nouveaux mots que je ne connaissais pas. Il fut un temps où je me serais levé pour prendre le dictionnaire et chercher sans être certain que ces termes très savant soit dans mon modeste Petit Larousse. 

Là je suis resté assis, juste l’iPad à porté de main, un coup de Google…

(Pour les curieux ces mots sont Sérendipité, conurbation, mouvement brownien)

Malgré tout, ce livre reste très abordable intellectuellement et est d’une grande richesse philosophique. Il porte un regard nouveau et intéressant sur notre monde actuel. 

Je le conseillerais en priorité aux parents et aux enseignants, et en particulier à Sacrip’Anne dont je suis sûr que cette lecture là passionnera ;-)

Voir aussi l’interview de Michel Serre par Libé sur “Petite Poucette”