Des fois, la camarde s’emmerde, la grande faucheuse s’ennuie, alors hop, la facétieuse  vient faire son marché. 

Deux vedettes d’un coup, livré en moins de 24 heures, une efficacité redoutable comme l’aimait la mère Denis ; ah oui, c’est bien vrai ça ! 

 

Donc d’abord, le gentleman aux yeux bleus, au verbe acéré, à la verve légendaire et l’humour décapant ! J’ai nommé Jean d’Ormesson. 

Je l’avoue, j’adorais les passages du monsieur dans le petit écran. C’était bien souvent un moment savoureux, tant, qu’en toutes circonstances et quel que soit le sujet, il arrivait à nous inonder de sa bonne humeur et de sa joie de vivre.

Ce gars était un antidépresseur à lui tout seul qui n’avait pour unique défaut que celui d’être un libéral sacrément de droite, quoique avec l’âge, il semblât s’être assagi de ce côté. 

Écrivain prolixe au style agréable et efficace, amoureux de la langue française, des jolis mots et des phrases bien construites, il laisse derrière lui pas mal de best-sellers, même si tous ne sont pas des chefs-d’œuvre ; souvent quantité nuit à qualité.

Il n’empêche, que le bonhomme va me manquer, tout autant qu’à la culture de notre cher et tendre pays.

 

Quelques heures plus tard, dans un registre beaucoup moins littéraire, c’est notre Jojo national qui passait l’arme à gauche, laissant en carafe des milliers de fans désespérés. 

Il y a une semaine je disais en rigolant lors d’une conversation entre gens de bonne compagnie, que quand le rockeur, idole des anciens jeunes, allait tirer sa révérence, ce serait un deuil national ; j’avoue que je ne pensais pas si bien dire quand à l’heure où j’écris ces lignes, certains émettent sérieusement cette idée étonnante ! (NB: « Finalement ce sera un « hommage populaire », dixit l’Élysée !)

 

Je me moquais en disant cela, tellement ce qu’il fait est loin d’être ma tasse de thé, juste une ou deux chansons que j’aime bien.

Et puis ce matin en apprenant la nouvelle pourtant plus que prévisible depuis quelques jours, cela m’a fait un coup. Pas le gros chagrin des grands jours, mais quand même, je ne pus être indifférent à la chose. 

Allez savoir pourquoi.

Peut-être est-ce parce que le bonhomme bien souvent décrié par les jaloux m’avait un jour impressionné.

 

C’était  il y a longtemps, peu avant la première guerre du Golfe, si mes souvenirs ne me trompent pas, j’étais encore en CDI dans une boîte où j’officiais en tant que technicien audiovisuel. 

Ce jour-là nous bossions à Bobino, alors propriété de Philippe Bouvard. 

Le boulot consistait en une petite sauterie privée organisée par un grand cigarettier, et oui les temps changent, avec moult VIP du monde du spectacle convié (et certainement dûment rémunéré) pour dîner avec des clients triés sur le volet.

 

Et donc, Johnny était à une des tables…

 

Sur le plateau un animateur essayait de faire la transition entre discours commerciaux et amusement, un sympathique orchestre assurait les temps morts du mieux qu’il le pouvait. Il va de soi qu’aucune de la dizaine de célébrités invitée n’était censée monter sur scène…

 

Le repas étant bien arrosé, certains de ces hôtes de marque firent chauffer l’ambiance jusqu’à ce qu’un fameux « Johnny une chanson » fût lancée par deux d’entre eux, vite repris en chœur par le reste de la salle.

 

Je somnolais à l’entrée des coulisses lorsque je vis venir à moi un type qui dut me prendre pour le régisseur général et me sollicita (je résume) pour savoir si l’orchestre pouvait accompagner son patron. Je le mis en contact avec les musiciens ; la tête des gars valait son pesant de cacahuètes quand ils comprirent le pourquoi de la chose !

 

Quelques minutes après IL arriva, débonnaire, sympathique, avec une prestance naturelle qui ne pouvait que forcer le respect. Il salua tout monde, nous serrant les mains ; c’est à peine s’il ne s’est pas présenté des fois qu’on ne sachent pas vraiment qui il était.

 

Il demanda au musicien s’ils connaissaient les standards du Rock, se mit d’accord sur deux ou trois titres, je ne sais plus, puis leur dit « ne vous occupez pas de moi, c’est moi qui vous suis ».

 

Le monsieur à assuré en bête de scène qu’il est, il nous a scotchés, impeccable, grand et pro, bien loin des caricatures peut flatteuse qui sont souvent faites de lui. 

 

Je ne suis pas un fan de ce qu’il chantait, on aime ou on n’aime pas, mais force est de constater que le bonhomme a traversé toutes les époques musicales depuis les années 60 sans que son succès ne faiblisse jamais et ça, cela ne se fait pas sans réel talent. 

 

Alors salut l’artiste…