La 3ème mi-temps

Il n’était pas loin de minuit lorsque cette nuit-là nous avions entendu tambouriner à la porte d’entrée. Nous n’étions pas encore couchés. Je me souviens que nous nous étions regardés l’air inquiet avant d’aller ouvrir. Qui pouvait bien nous rendre visite à cette heure tardive ? Venait-on nous informer d’une mauvaise nouvelle, nous demander de l’aide, nous prier d’évacuer les lieux ? C’est fou comme l’esprit se met plus facilement à galoper la nuit, sous l’emprise d’une soudaine panique.

Je me remémore nos regards à la fois soulagés et amusés quand nous avions découvert le visage jovial de l’imposant N. sous la lumière du porche. D’autant plus que notre voisin, pilier international de rugby, portait simplement sur un short, le blazer bleu marine de son équipe. Ses co-équipiers et lui venaient de remporter la victoire sur la pelouse du stade. Il était venu nous convier à la 3ème mi-temps. 

C’est ainsi que nous nous étions retrouvés avec d’autres joyeux comparses, comme au temps de nos jeunes années de potaches, à refaire le match monde dans le garage des voisins. En sirotant de la bière et une liqueur de mirabelle faite maison datant de nombreuses années. Une tuerie !  N’importe quel moustique, qu’il soit tigre ou pas, n’aura pas survécu aux vapeurs alcoolisées d’un tel breuvage.

Je me rappelle avoir cru que N. s’était blessé pendant le match. Grisée par l’ambiance festive (mais pas que !), j’avais pris ses chaussettes de sport blanches, pointure 48, pour des plâtres à ses énormes pieds. Ce qui avait provoqué l’hilarité (et du boucan) parmi les noceurs du garage.

Un silence quasi religieux ne s’était installé que lorsque N. avait calé un ukulélé dans ses gros bras tatoués. Médusés, nous l’avions regardé et écouté jouer habilement un morceau musical de son île natale et lointaine.

Impossible de me souvenir à quelle heure la fête s’était terminée. Je crois bien qu’il n’était pas loin de celle du chant du coq. De la séance de décrassage aussi. Pour tout le monde.

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