Olive

Le jeu des 366 Alphabétiques imposant aujourd’hui le mot olive, j’ai pensé aussitôt à une olive que j’ai eu maintes fois à ma bouche l’an dernier, une olive que je n’ai pas croquée, pas crachée, mais que j’ai dite, six fois en public et je ne sais combien de fois avant et entre deux présentations, et une nouvelle fois avant d’écrire ce billet, pour mon plaisir, le plaisir d’extraire de ma mémoire, le plaisir de dire encore, une olive métaphorique dans ce poème de Guillaume Apollinaire, extrait de son recueil Calligrammes :

Ombre

Vous voilà de nouveau près de moi
Souvenirs de mes compagnons morts à la guerre
L’olive du temps
Souvenirs qui n’en faites plus qu’un
Comme cent fourrures ne font qu’un manteau
Comme ces milliers de blessures ne font qu’un article de journal
Apparence impalpable et sombre qui avez pris
La forme changeante de mon ombre
Un Indien à l’affût pendant l’éternité
Ombre vous rampez près de moi
Mais vous ne m’entendez plus
Vous ne connaîtrez plus les poèmes divins que je chante
Tandis que moi je vous entends je vous vois encore
Destinées
Ombre multiple que le soleil vous garde
Vous qui m’aimez assez pour ne jamais me quitter
Et qui dansez au soleil sans faire de poussière
Ombre encre du soleil
Écriture de ma lumière
Caisson de regrets
Un dieu qui s’humilie

 

Le poème étant sans ponctuation, on peut l’interpréter de diverses manières. L’un de mes partis pris, que j’ai dû défendre une fois face à une autre interprétation qui n’était pas fausse non plus, est de marquer un silence avant « Un Indien à l’affût pendant l’éternité / Ombre vous rampez près de moi […] ». Si je devais redire ce poème en 2018, je le dirais peut-être différemment.


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