samedi, 14 novembre 2015

Badaboum...

Hier je me demandais sous quel angle m’attaquer au mot « Grèce » sans tomber dans les poncifs « crise, dette, révolution » ou « Vacances, soleil, ouzo » et puis…

Comme tout le monde, sidéré, pas étonné, mais sidéré.

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Pas étonné parce que j’ai l’impression que pour moi, le risque d’attentat est quelque chose que j’ai inconsciemment intégré au même titre qu’un accident de voiture par exemple.

 

Le premier qui m’avait marqué, est celui de la rue des Rosiers en 1982, sûrement parce que c’est le premier qui fut, compte tenu des moyens techniques de l’époque, surmédiatisé. Peut-être aussi parce que j’avais 16 ans et un début de conscience politique…

 

1986, fut mon année attentat. J’étais alors étudiant à Paris, en école de cinéma. Les cours avaient lieu du côté des champs Élysée.

Un jour, avec un ami nous allions faire une course à la FNAC Sport aux Halles (hé oui, il y avait une FNAC sport). Quelques heures plus tard, en rentrant chez moi, j’apprends qu’une bombe y a explosé ; étonnamment vite oublié dans l’insouciance de la jeunesse.

 

Un mois plus tard, alors que je sors de cours et m’enfonce dans une bouche de métro, on entend comme un bruit sourd d’explosion. Je n’aurais pas école

le lendemain, une bombe venait d’exploser dans la galerie Point Show des Champ Élysée ; les matins nous tenions cours dans la salle de cinéma placé dessous…

 

Septembre 1986, travail étudiant à la FNAC des Halles. Régulièrement il nous arrivait d’appeler les autres FNAC pour savoir si elles avaient tels ou tels matos en stock, si nos ordinateurs faisaient à peu près bien les choses sur le magasin sur lequel on bossait, on ne parlait pas encore de mise en réseau.

Le 17 septembre j’appelle la FNAC Montparnasse pour savoir si je pouvais leur envoyer un client. Contrairement à l’habitude, personne ne répond, ils doivent être débordés, j’insiste, un peu, beaucoup en faisant des grands sourires désolés à mon client. Finalement, après de longues minutes une voix répond un peu brusquement ! J’explique qui je suis et j’entends « Désolé nous sommes fermés une bombe vient d’exploser » et raccroche…

J’ai l’impression d’être resté un moment figé et d’avoir répondu à mon client interrogatif : « Je crois qu’ils n’en ont pas ! »

Une bombe venait de sauter devant Tati rue de Rennes, mais à l’époque pas de réseaux sociaux en temps réels…

 

Je me souviens de l’attentat du RER B à Saint Michel, j’étais en Suisse, en vacances avec des amis dont des proches prenaient régulièrement cette ligne…

 

Le 11 septembre 2001, j’en ai déjà parlé ici, j’allais au boulot, à l’époque il n’y avait que France info, j’ai dû attendre d’être rentré chez moi vers minuit pour voir les images et prendre des nouvelles de Cindy (celle qui à fait 6000 bornes juste pour fêter mes 50 ans) dont le mari travaillait parfois à New York, dans les fameuses tours et d’une autre amie arrivée deux semaines avant pour travailler aussi du côté de Wall Street et qui ce jour-là était en stage en dehors de Manhattan. J’ai vraiment apprécié la rapidité toute nouvelle d’internet et des mails.

 

Pour Charlie, j’étais dans le TGV, en train de lire Charlie justement, j’allais au ski, pour la première fois je me suis rendu compte de la puissance des réseaux sociaux, de l’info en direct, voire de la non-info, de l’emballement médiatique ; j’ai fait la minute de silence assis, seul, sur un télésiège.

Et puis de par mon boulot, je me suis souvent retrouvé dans des réunions publiques considérées à haut risque d’attentat, combien de fois j’ai vu à l’œuvre, préventivement, la brigade de déminage, ce chien qui un jour, s’était pris les pattes et avait arraché des câbles de ma régie ; sans jamais y croire, je savais qu’il y avait un risque. Je n’allais pas changer de job non plus…

 

Alors hier soir, je n’étais pas étonné, juste sidéré. Triste de la connerie humaine. Et puis un peu d’angoisse pour des proches. Cette amie que je savais possiblement dans ces quartiers, ce copain collègue qui avait posté sur Facebook, quelques heures avant une photo en provenance du stade de France où il bossait, et puis cet autre que je savais bosser de temps en temps au Bataclan…

Ils vont tous bien…

 

Maintenant la vie continue, ce soir, s’il n’est pas annulé, j’irai au concert de « The Do » à l’Olympia, comme prévu de longue date, il n’y a pas de raison, peut être que je ferais un peu plus attention autour de moi, et puis… [edit : Le concert est annulé]

 

Lundi j’irai comme prévu bosser dans ce lieu considéré comme sensible, voir comme une cible privilégiée. Peut-être que les contrôles à l’entrée seront un peu renforcés…

 

Je reprendrais le train-train quotidien, parce qu’il n’y a pas de raison de faire autrement…

Et puis je voudrais faire mien ce billet qu’un ami a écrit hier sur Twitter :

 

Je ne laisserai pas la colère m’envahir ;

Je ne laisserai pas la haine me surmonter ;

Je ne me laisserai pas déborder par la rage.

 

 

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Le mot du jour : Gréce.
La liste des 366 Alphabétiques
Les participants du 366 Alphabétiques

Bisous

Paris - 13 novembre 2015 - Jean Jullien : http://www.jeanjullien.com/

Crédit : Jean Jullien

14/11 : g comme Grèce

La Grèce,
berceau de l'Europe,
a failli
en être le caveau.

Αισιοδοξία (Κι άν τό δέντρο καίγεται)

Titre traduit du Grec en Français :
Optimisme (Et si l’arbre brûle)

Chanson par ANGÉLIQUE IONATOS,
extraite de l’album RESTE LA LUMIÈRE – ΜΕΝΕΙ ΤΟ ΦΩΣ
publié en octobre 2015

Angélique Ionatos - Reste la lumière

Le texte de la chanson a été emprunté à DIMITRIS MORTOYAS, poète exilé, né en 1934, mort en 1975 à Londres.

« Et si l’arbre brûle reste la cendre et la lumière.
Dans le désert les cactus prennent racine.
Si les sources se sont taries il pleuvra à nouveau.
Le jeune fils reviendra à la maison abandonnée.
Sous la neige épaisse les graines veillent.
À la frontière de la cour le vent mauvais s’épuise.
Et si nous sommes dénudés et entourés de loups,
notre décision de nous battre reste intacte. »

~~~~~~~~~~~~~~

En 1974, Dimitris Mortoyas écrivait à l’un de ses amis :

« […] Mon dernier espoir je le mise sur la grande crise dont les signes avant-coureurs se dessinent clairement. Les métropoles industrialisées se rempliront de chômeurs, l’amour de la liberté se figera, les classes moyennes deviendront de plus en plus fascisantes et dans la plupart des pays les gardiens de l’orthodoxie recommanderont le bon sens et la prudence. Ils s’étonneront que le système soit dévoré de contradictions. Quant à moi, je risquerai de mourir de faim. Mais cette éventualité ne m’inquiète pas outre mesure. Après tout ne suis-je pas arrivé jusqu’ici en ayant faim de tout ?… »

(J’ai trouvé cet extrait de lettre dans
ce billet signé Angélique Ionatos.)


Ce billet aurait existé sans le mot du jour du jeu des 366 Alphabétiques : GRÈCE…

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Et si vous ne connaissez pas Nadya au cœur grec :
https://laviedenadyaposissef.wordpress.com/